Par une décision publiée au recueil Lebon, rendue en sous-sections réunies le 2 juin 2016 (n°395033-396645), le Conseil d'Etat a rejeté les pourvois introduits par la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes tendant à l'annulation de deux ordonnances rejetant les demandes formulées par l'Agence régionale de santé d'Auvergne, tendant à la suspension de l'exécution d'un marché public de déconstruction-conception-réalisation conclu par le Centre hospitalier Emile Roux du Puy-en-Velay, défendu par la SCP Lyon-Caen & Thiriez.
Dans cette affaire, la question principale était celle de la recevabilité des deux requêtes introduites par l'agence régionale de santé (ARS) d'Auvergne, sur le fondement des dispositions combinées des articles L.6143-4 du code de la santé publique et L.554-6 du code de justice administrative, d'une part, et de l'article L.521-1 du code précité, d'autre part, aux fins des suspension du marché public litigieux.
En application de l'article L.6143-4 du code la santé publique, les directeurs généraux des ARS disposent du pouvoir de déférer à la juridiction administrative les délibérations et décisions portant sur les matières qu'il énumère. Ce recours peut être assorti, en vertu des dispositions combinées du dernier alinéa de cet article et de l'article L.554-6 précité, d'une demande de sursis à exécution.
Saisi sur ces fondements d'un recours tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du marché litigieux, le Conseil d'Etat a jugé la demande irrecevable, aux motifs qu'il résulte des dispositions de l'article L.6143-4 précité, dans leur rédaction issue de la loi du 21 juillet 2009, que les actes relatifs à la conclusion des marchés publics ne sont pas au nombre de ceux qui peuvent être déférés par les directeurs généraux des ARS. Il en résulte ainsi que, depuis l'entrée en vigueur de cette loi, les marchés publics passés par les établissements de santé ne sont plus susceptibles d'être déférés, que ce soit par le représentant de l'Etat dans le département ou par les directeurs généraux des ARS.
Anticipant le risque d'irrecevabilité de ce recours, l'ARS d'Auvergne avait pris le soin d'introduire, en parallèle, un recours de pleine juridiction en contestation de la validité du marché litigieux (CE, Ass, 4 avril 2014, Tarn-et-Garonne, req. n°358994), assorti d'une demande tendant, sur le fondement de l'article L.521-1 du code de justice administrative, à la suspension de son exécution.
Statuant sur la demande de suspension, le Conseil d'Etat a tout d'abord jugé qu'il appartient à l'ARS, comme à tout tiers, de démontrer qu'elle a été lésée dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par la passation ou les clauses du marché pour en contester la validité ou demander la suspension de son exécution. Il a ensuite estimé que les intérêts propres de l'Agence, en tant que structure administrative, n'étaient pas lésés par sa passation et en a conclu que le juge des référés de première instance n'avait pas commis d'erreur de droit, ni dénaturé les pièces du dossier en rejetant le recours comme irrecevable.